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Les 4 Fantastiques de Tim Story
Avec : Ioan Gruffudd, Jessica Alba, Michael Chiklis, Chris Evans, Julian McMahon

Des supers plombés à l’ordinaire

Reed Richards est un savant visionnaire mais incompris: la NASA a refusé de financer son programme d’étude des rayonnements cosmiques, capables de bouleverser à jamais la médecine moderne. Alors, il se voit contraint d’approcher son vieux rival, le richissime industriel Victor Von Doom qui, après avoir récupéré l’ex de Reed, espère bien en faire de même avec ses éventuels brevets. Embarquent avec Reed et Victor pour le bien de cette mission l’astronaute Ben Grimm, le meilleur ami du premier, Sue Storm ladite ex, directrice des recherches génétiques du second ainsi que le frère cadet de celle-ci, Johnny Storm, un pilote aussi intrépide qu’arrogant. Evidemment la mission vire au cauchemar : la station orbitale traverse un nuage cosmique qui se charge d’altérer les codes génétiques des cinq occupants ; ils se retrouvent avec des pouvoirs aussi divers que variés : les champs de force combinés à l’invisibilité, le feu, l’élasticité et l’indestructibilité. Aux yeux du monde entier, ils deviennent les quatre fantastiques, aux yeux de Von Doom – lui aussi irradié – un obstacle à éliminer pour jouir du pouvoir absolu.

En 1961 naissait sous la plume de Jack Kirby et Stan Lee Les quatre fantastiques afin que Marvel puisse concurrencer DC Comics et sa Ligue des justiciers d’Amérique. La réelle nouveauté de cette franchise reposait sur la nécessaire union de héros aussi inédits que leurs pouvoirs là où La ligue… s’apparentait plus à une cohabitation de figures déjà mythiques en solo telles que Batman, Superman ou Wonder Woman. En ce sens, Les quatre fantastiques constituait une véritable matrice d’un sous-genre qui allait connaître son plus gros succès public avec les X-Men avant de traverser ces vingt dernières années une crise existentialiste salutaire sous l’impulsion de Mike Mignola (Hellboy) et surtout du tandem Alan Moore/Dave Gibbons (The Watchmen). Il était donc question depuis une dizaine d’années de porter le comic book à l’écran mais l’intérêt pour le projet commençait à décroître sérieusement à l’annonce du casting (principalement issu de la télévision) et du réalisateur dont les faits d’armes se limitaient à une comédie communautaire balourde (Barbershop) et un remake d’un succès gaulois (Taxi), les premières images se chargeant après de saper les espoirs les plus tenaces.

Alors on se préparait aux Quatre fantastiques sans vraiment les attendre... Pourtant le produit final a de quoi laisser perplexe parce qu’il n’est ni la bonne surprise, ni le navet tant redouté. Le terme le plus approprié pour le résumer serait “moyen”, ce qui pose problème car ce film devrait épouser le titre. Pas un plan qui ne soit traversé par une virtuosité affirmée, pas une séquence qui ne soit pour autant encombrée par des prétentions frisant le pédantisme à trois centimes d’euro : autrement dit, tout ceci n’est guère enthousiasmant mais, au moins, regarder Les quatre fantastiques ne s’apparente pas au supplice comme ce fut le cas pour Hulk d’Ang Lee.

Seulement, une absence de prétentions ne va pas forcément de pair avec une déficience de savoir-faire et de fun. De ce fait la progression narrative en dents de scie et la direction d’acteurs inconséquente handicapent réellement le film qui se voit comme un pilote de sitcom au lieu de la grosse machine qu’il devrait être : successions de situations qui, à l’image du verre à moitié vide ou plein, oscille entre le plutôt drôle et le gentiment pathétique. Cette frontière scinde logiquement le quatuor où le cocasse est dans l’ensemble la chasse gardée de Michael Chiklis et Chris Evans : la course de snowboard tout feu tout flamme, le premier réveil de Ben Grimm après l’accident spatial. Le climax reste l’amusante séquence musicale de la quarantaine où la confrontation entre les pouvoirs et le train-train quotidien donne lieu au slapstick le plus élémentaire pour atteindre des accents presque “Farrelliens” devant l’incongruité de certains gags (chercher le papier toilette dans le placard à l’opposé du couloir sans se lever de la cuvette). Ces trop courts moments sont assurément les meilleurs du film. L’humour involontaire, hélas tout aussi présent, repose sur Jessica Alba et Ioan Gruffudd. La première, en scientifique de haut vol à décolleté pigeonnant, est aussi crédible que Denise Richards en physicienne nucléaire dans Le monde ne suffit pas, le second dispose d’une profondeur émotionnelle capable de rivaliser avec sa figurine en plastique vendue dans les supermarchés. Seul Michael Chiklis – dont le charisme n’est plus à prouver depuis sa révélation dans The Shield – sauve les meubles avec le drame de son apparente monstruosité…

Bizarrement, tous ces points d’une fantastique mollesse ne seraient pas des plus gênants si la partie action se montrait à la hauteur. Malheureusement Les quatre fantastiques patine dès lors que les super pouvoirs sont maîtrisés et la balance penche définitivement du mauvais côté. La faute en incombe à un final bâclé par des scènes d’actions traitées comme une corvée, des héros desservis par des punch lines suffisamment stupides pour qu’eux-mêmes n’y croient pas, attendant que les effets spéciaux (loin d’être irréprochables) cachent la misère. Dr Doom apparaît trop tard et, pire que tout, se montre aussi terrifiant qu’un méchant échappé de Bioman. Nettement plus effrayant est l’épilogue où Ben Grimm alias la Chose assume enfin sa laideur parce que “…seul comptent l’amitié et la beauté intérieure…” et grâce surtout à une aveugle taille mannequin qui est bien pratique pour tuer les complexes et se balader en caleçon et chemise ouverte… Devant une telle pauvreté, il est urgent de revoir en DVD une vraie famille de fantastiques, Les Indestructibles !
J.F. 

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