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Philip Roth, juif, américain, et écrivain
« Je ne me suis jamais considéré, ne serait-ce que le temps dune seule phrase, comme un écrivain juif américain, ou américain juif. La conscience que jai de mon pays, je la dois à des écrivains pour la plupart nés en Amérique trente à soixante ans avant moi, du temps où des millions de pauvres quittaient le Vieux Monde pour le Nouveau, et où des immigrants parlant yiddish, venus de Russie et dEurope de lEst, allaient parmi tant dautres remplir les taudis de nos villes. »
Philip Roth est né dans le New Jersey, en 1933. Il a grandi dans la middle-class de Newak, décor fréquent de ses récits, a intégré luniversité de Bucknell puis celle de Chicago. Il a enseigné jusquen 1992 la littérature comparée à lUniversité de Pennsylvanie. Son premier recueil de nouvelles, Goodbye Columbus (1959), lui a valu le prix du National Book Award en 1960.
Après Portnoy et son complexe, Roth donne naissance en 1979 à son double littéraire, Nathan Zuckerman, dans LEcrivain des Ombres, suivi de Zuckerman délivré (1981) et de La Leçon danatomie (1983). Zuckerman reparaît dans La contrevie et dans La Pastorale Américaine, bardée de prix dont celui, en France, du Meilleur Livre étranger en 2000. La Tâche, qui vient dêtre adapté au cinéma par Robert Benton, est son dernier succès, couronné par le Prix Médicis Etranger 2002, où Zuckerman, encore et toujours là, dissèque à nouveau les souffrances de la civilisation américaine.
Quel que ce soit le support (nouvelles, récit, roman), les œuvres de Philip Roth traitent toujours, de près ou de loin, de la société juive américaine, des rapports familiaux et sociaux, bref du contexte de la vie de Roth lui-même. Celui-ci ne se sépare jamais de son humour et de son sens de la dérision, tout en brossant sans relâche un tableau réaliste de lexistence tumultueuse de son pays.
« Alors, juif de Newark, pourquoi pas ? Mais juif américain ? Américain juif ? Jappartiens à une génération autochtone : notre enfance a eu pour décor et pour spectacle les tribulations du pays dans une guerre mondiale qui séternisait ; lycéens ou étudiants, nous sommes arrivés à la majorité pendant les grands chambardements de la décennie daprès-guerre ; grandir américains a été une expérience trop riche pour ne pas déborder une quelconque étiquette restrictive. Je ne me suis jamais considéré, ne serait-ce que le temps dune seule phrase, comme un écrivain juif américain, ou américain juif, pas davantage que je nimagine Theodore Dreiser, Ernest Hemingway ou John Cheever se considérant comme des écrivains chrétiens américains, ou américains chrétiens. En tant que romancier, je me considère pour ma part et ce depuis mes début, il y a plus de quarante ans comme un Américain libre, qui imagine aussi vigoureusement quil le peut ce quil lui plaît de représenter, dans la langue maternelle dont il est lesclave un esclave reconnaissant. »
1. Philip Roth, « Romancier américain tout court », Le Monde, 11 novembre 2002.
2. Cf. la chronique de J.H.D.
3. Ibid.
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