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Les cahiers de Monsieur F. : à propos de Bach et de Debussy

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Claude Debussy : En blanc et noir - Six Epigraphes Antiques – 3e, 4e et 7e Préludes (Livre I)

Claude Debussy est l’un des compositeurs qui, à l’instar d’un Bach, aura fortement marqué l’histoire de la musique. Novateur, audacieux, il annonce sur bien des points des compositeurs comme Pierre Boulez, Varèse, Messiaen. Chez ce fils de commerçant, on trouve 50 ans d’avance sur son temps ! Intensité, nuances, agrégats sonores, souplesse rythmique, Debussy en souligne la richesse tout en reléguant la contrainte académique de la tonalité à un pâle esquif flottant sur les vagues mouvantes de sa musique. Chez lui, l’important, c’est le timbre, la couleur qui structure les compositions. C’est précisément dans ses œuvres pour piano que Debussy se montre novateur et visionnaire. En blanc et noir (été 1915) s’inscrit dans les dernières œuvres du compositeur, à la même période que les Etudes. Volontiers patriotique, Debussy est alors très touché par la guerre, il précise en signant ses œuvres qu’il est un musicien français et montre une certaine hostilité aux compositeurs d’outre-Rhin comme Schönberg. A l’en croire, c’est dans l’urgence qu’il compose En blanc et noir, pour 2 pianos en 3 mouvements : le 1er, avec emportement, met en balance des structures tendues et incisives et des blocs de valeurs très rapides, le diatonisme est marqué, ainsi que la polytonalité qui donne du relief à l’ensemble et insuffle du dynamisme ; le 2e, probablement le plus ingénieux, offre une remarquable palette de couleurs dans une harmonie quasi atonale, se rapprochant de l’esprit de Schönberg, teintes sombres (ce sont les célèbres « gris de Velasquez ») - les fanfares dans le lointain sont censées rappeler que ce mouvement est dédié au lieutenant J. Charlot, mort sur le front en mars 1915 ; le 3e, scherzando, enlevé et aux contours variés, est traité dans le même esprit que la première pièce, avec une trame plus fluctuante et obstinée (notes itératives) - là aussi on songe aux gris de Velasquez. L’écriture des 1er et 3e mouvements est très fluide. L’ensemble de l’œuvre est placée sous le registre des séquences cloisonnées, la forme se modifie dans l’instant. Là encore, c’est le timbre qui est mis en avant, sur un instrument pourtant réputé « monocolore ». Les Six Epigraphes Antiques sont un parangon de raffinement tant dans le jeu mélodique que dans le flux sonore. C’est en 1913 qu’il transcrit cette musique de scène pour piano à 4 mains. Les Préludes se situent entre les audaces des Images et les évocations pittoresques des Children’s Corner. Souvent bâtis sur le schéma A-B-A, la forme n’en est pas moins libre. Il s’agit ici de 3 préludes du 1er livre (1909-10), les titres sont indiqués à la fin des pièces. Les accords-timbres construisent ce jeu de couleurs mouvant, entre peinture figurative et non figurative car c’est la musique qui, au final, crée le titre, simple suggestion. Le 3e prélude du livre I utilise les sextolets et des sortes de digressions chromatiques avant de s’estomper : il s’agit d’essais sur la couleur. Cela nous rappelle que pour Debussy, ce qui compte, c’est la diversité et le contraste. Le n° 4, modéré, présente un grand intérêt dans l’enchaînement des accords (accords parfaits - harmoniques 1 à 5 - se suivant à intervalles de tierces). Le n° 7 du livre I, animé et tumultueux, est un exemple de contrastes, le vent d’Ouest est ici rendu par rafale d’arpèges, comme s’il avançait dans un tourbillon mouvant et menaçant (cf. le final brutal sur un accord dissonant et le grave). Tout est mouvement, flux, remous. Le danger est présent, il pèse comme le suggère la tension harmonique. C’est un tumulte.

Interprétations

Aldo Ciccolini : L'Œuvre pour piano (5 CDs) parue chez EMI Classics
Ciccolini est un habitué de Satie et Debussy. Son interprétation n’est pas transcendante. Pour autant elle sonne avec justesse et permet d’approcher l’œuvre de Debussy dans un vaste ensemble.



Ernest Ansermet : Jeux, Six Epigraphes Antiques, paru chez Testament
Ansermet met toute sa sensibilité dans une interprétation subtile de Debussy.



Theodore Paraskivesko : L'œuvre pour piano, paru chez Calliope
Lauréat du Conservatoire de Bucarest, Paraskiesko est aussi Premier Prix Claude Debussy en 1971.

Monsieur F.

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