chroniques cinéma
The Queen de Stephen Frears |
Avec : Helen Mirren, James Cromwell, Michael Sheen, Alex Jennings |
Le crépuscule des idoles Comble de l’ironie, au moment où la reine d’Angleterre devient l’héroïne d’un film, elle doit descendre de son piédestal pour devenir le simple sujet du nouveau film de Stephen Frears. Elle conserve encore le privilège du 35 mm face à son nouveau premier ministre, un certain Tony Blair cadré en 16 mm. Stephen Frears poursuit ici une singulière entreprise et Michael Sheen endosse de nouveau le rôle de Tony Blair. Dans The Deal, le cinéaste relatait l’ascension irrésistible du futur premier ministre au nez et à la barbe de Gordon Brown. Tony Blair a pourtant réussi son pari. The Queen s’ouvre sur son élection triomphale un soir de mai 1997. Tout juste élu, le nouveau premier ministre entend insuffler un peu de modernité à la fonction même s’il doit bientôt composer avec le protocole incarné par une reine qui a déjà connu dix premiers ministres et pas des moindre puisqu’elle a côtoyé Winston Churchill. La mort brutale de la princesse Diana, un soir d’août finira par rapprocher ces deux contraires. Alors que Tony Blair salue la princesse du peuple et s’assure à peu de frais une certaine popularité auprès de ses concitoyens, la reine est brocardée pour son absence de réaction qui passe mal dans l’opinion. Stephen Frears analyse les rapports de force et décortique les arcanes du pouvoir avec un réalisme saisissant. Michael Sheen et Helen Mirren incarnent un premier ministre et une reine plus vrais que nature. Surtout, le cinéaste joue subtilement d’u montage d’archives pour redonner vie à Lady Diana sans avoir à recourir au jeu d’une comédienne. De même, le peuple britannique n’existe ici que par le biais des images de la télévision, à la fois invisible et omniprésent. Un peu démagogique au départ, le film gagne en complexité à mesure que la reine et son premier ministre comprennent l’intérêt qu’ils ont à travailler ensemble : asseoir sa popularité pour Tony Blair, sauver la monarchie pour la reine mal aimée de ses sujets. Au passage, Stephen Frears réhabilite la figure du Prince Charles, assez critiqué par la presse tabloïd à l’époque, une des grandes audaces du film. Stephen Frears entend démontrer l’habilité de Tony Blair, son aptitude à composer avec la presse et l’opinion publique. Homme de l’ombre, son conseiller dévoué Alastaïr Campbell jubile. Il a soufflé à son patron la formule Princesse du peuple et tire désormais les ficelles pour de nombreuses années, en particulier au moment de la guerre en Irak et des fameuses armes de destruction massive de Saddam Hussein. La mort de Diana marque donc un changement d’époque, relayé dans le monde entier. Le pouvoir échappe désormais à ses dépositaires au profit de ceux qui peuvent contrôler l’information au grand dam de la famille royale. Une autre bataille se joue désormais en coulisses et ce n’est pas la moindre qualité du film de Stephen Frears que de s’en faire l’écho désabusé. J.H.D.
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