chroniques cinéma
Novo de Jean Pierre Limosin |
Avec : Eduardo Noriega, Anna Mouglaglis, Nathalie Richard, Paz Vega, Eric Caraveca |
Un parfum de mystère. Graham (Eduardo Noriega) est une victime : victime de sa maladie (suite à un choc, il est devenu amnésique, toute les trente minutes sa mémoire immédiate s'efface), victime des femmes qui le manipulent et en font un objet de pouvoir. Tel un Sisyphe du quotidien, il repart toujours de zéro, avec pour seule mémoire un carnet attaché à son bras. Sa rencontre avec Irène (Anna Mouglalis), employée au sein de la même société que lui, donne un tour inattendu à son existence. Novo est un film sur les femmes, sur leurs qualités et leurs défauts, leurs rêves et leurs craintes, leurs fantasmes. Pour Graham, comme le rappelle Irène, c'est à chaque fois la première fois, ce qui en fait un personnage unique, doté d'une charge fantasmatique puissante pour les femmes qui retrouvent en lui l'innocence de l'enfance et qui surtout peuvent se donner sans retenue à lui sans avoir peur du lendemain. Graham offre aux femmes un cadeau inestimable, il les aident à se révéler à elles-mêmes. La patronne de Graham sous ses faux-airs de mère supérieure se révèle possessive, dominatrice et déterminée, Irène légère et jouisseuse devient amoureuse de Graham. Jean-Pierre Limosin construit son film comme un film d'espionnage avec son complot, ses mystères, ses filatures, sa méchante, la mémoire effacée du héros et même ses gadgets. Mais un film d'espionnage allusif, où tout est suggéré et effleuré, laissant une large place à l'imagination des spectateurs. Malheureusement, Novo est rempli d'idées non-abouties et d'une symbolique convenue (Graham nu sur la plage pour signifier sa renaissance est une métaphore un peu facile mais soit, en revanche la scène de la dent et du vagin n'est pas convaincante) qui nuit au développement d'un film qui finit par tourner autour de son concept sans réellement progresser dans sa réflexion à l'instar de son héros qui à cause de son handicap ne parvient pas à avancer dans l'existence. Un concept n'a jamais suffit à faire un film et encore moins un bon film… Néanmoins, servie par une sublime photographie qui transforme les objets les plus ordinaires (une ceinture, une paire de chaussures) en objets érotiques, la performance des acteurs transcende le film. Le choix d'un acteur étranger, Eduardo Noriega, pour jouer le rôle d'un homme complètement perdu est une excellente idée. Sa maîtrise toute relative de la langue française et de l'environnement français renforcent ce sentiment de perdition, seul son jeu lors de la fin du film sur un tout autre registre est moins convaincant. La prestation charnelle et puissante d'Anna Mouglalis est magnifique. Habitant son personnage, elle donne vie et épaisseur à Irène et parvient à faire ressentir aux spectateurs toutes les facettes de sa personnalité. Formellement très réussi et foisonnant d'idées, Novo n'est qu'un film concept, parfois intéressant mais qui se disperse et ne parvient pas à dépasser son objet. Il n'en demeure pas moins que grâce à Anna Mouglalis ce film est doté d'une âme et offre une expérience sensuelle et entêtante comme le parfum d'une fleur vénéneuse. G.P.L.
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