sommaire cinéma
@ chroniques de films
articles

Inscrivez-vous à la newsletter PurJus

chroniques cinéma


Collatéral de Michael Mann
Avec : Tom Cruise, Jamie Foxx, Jada Pinkett Smith, Benicio del Toro

La Ville et ses fantômes

Quand vient la nuit, les coyotes quittent le désert californien et investissent les rues de Los Angeles. La ville leur appartient, elle se transforme pour quelques heures, peuplées d’inquiétantes figures nocturnes surgissant au détour d’un feu rouge comme le figure l’une des plus belles scènes de ce thriller urbain virtuose.

Max conduit son taxi le temps d’économiser l’argent nécessaire au démarrage d’une affaire de location de limousines. Il accepte un soir un client particulier Vincent. Ce dernier lui propose de l’accompagner toute la nuit, le temps de finaliser cinq contrats. Quand la première personne visitée s’écrase sur le toit de son taxi, Max comprend trop tard qu’il ne peut plus reculer. Devenu l’otage de Vincent, il va le suivre jusqu’au bout de la nuit…

Pas plus de cinq minutes seront nécessaire à Michael Mann pour confirmer sa réputation de talentueux formaliste du cinéma hollywoodien. Une suite d’allers et venues dans le taxi de Max permet d’établir la marque de fabrique de cette œuvre magistrale. Michael Mann travaille la dualité, jouant sur l’antagonisme entre l’assassin et son chauffeur. La cliente du début du film contraste avec la relative froideur de Vincent mais aussi avec toute la faune rencontrée plus tard. Après une série de très beaux plans aériens de la ville, le film évoluera dans une succession d’espaces clos, ruelles sordides, boîte de nuit, tour de verre et bien sûr taxi.

Michael Mann reprend l’opposition classique flic/tueur réduite dans un premier temps à une opposition dominant/dominé. La grande force de Collatéral tient dans sa capacité à dépasser cette opposition et à ouvrir de nouvelles perspectives, à travers notamment l’évolution du personnage de Vincent., incarné par Tom Cruise. Au début du film, le tueur demeure inaccessible, sûr de lui et déterminé. Impassible et impérieux, le personnage ressemble à un spectre, une apparition semblable aux coyotes que l’on aperçoit plus tard dans le film au beau milieu de la nuit. Vincent doit en fait éliminer les témoins à charge du procès d’un baron de la drogue, reflétant ainsi des forces invisibles à l’œuvre pour barrer la Justice dans l’Amérique contemporaine.

Le taxi lui donne pourtant l’occasion de se confier à Max, d’exprimer ses doutes et son désir de sortir de l’ornière, pour devenir quelqu’un. Ainsi Vincent perd progressivement le contrôle de la situation au fur et à mesure qu’il se dévoile jusqu’au final dans la rame de métro. Au début du film, le tueur avait évoqué un fait divers, l’histoire d’un homme mort dans le métro sans avoir suscité la moindre compassion des autres voyageurs. Ce passager n’était pour eux personne. Ainsi quand Vincent meurt à la fin du film, il nous émeut parce qu’il est devenu quelqu’un, conclusion mélancolique et inattendue de ce très grand film.
J.H.D. 

< autres chroniques



Copyright 2000-2024 PurJus.net - <redac [AT] purjus [POINT] net> [*]
([*] veuillez supprimer les espaces pour former l'adresse mail réelle, merci -
ceci est fait pour lutter contre les collecteurs automatiques d'emails -
anti-spam)