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Mar Adentro de Alejandro Amenabar
Avec : Javier Bardem, Belen Rueda, Lolo Duenas, Mabel Rivera, Celso Bugallo

Le Naufrage Amenábar

A la suite d’un plongeon exécuté à marée basse, Ramón a perdu l’usage de son corps. Prostré dans son lit depuis près de trente ans, ne pouvant bouger que la tête, Ramón réclame l’euthanasie.

Mar Adentro confirme tout le mal que l’on peut penser d’Alejandro Amenábar, le cinéaste espagnol le plus surestimé du moment. Il quitte le registre du fantastique pour celui du “basé sur une histoire vraie” et, autant être clair, le frottement de sa mise en scène “trois tonnes” avec le drame réaliste tourne à la Bérézina. Amenábar fonce dans le tas, avec son sujet de société meurtri au burin, sa figure sacrale de l’handicapé, la transformation mimétique de son acteur en harmonie avec la souffrance de Ramón. Il tombe dans tous les pièges du tire-larmes facile, parfaitement calibré pour faire pleurer dans les chaumières lors de son futur passage télé.

Et pour les torrents d’émotions factices, rien de mieux que des plans léchés avec application et des raccourcis ridicules, tels les visiteurs de Ramón fausses métaphores de l’Espagne d’aujourd’hui et vraie cour des miracles chargée de stéréotypes navrants. Il faut avaler la rivalité entre la prolétaire émue et la belle avocate pour l’amour de Ramón (victoire par K.O culturel de l’Espagne d’en haut, cela va de soi), ceux qui comprennent son désir d’en finir et ceux qui ne l’acceptent pas parce que trop “vieille école” (comprendre trop ruraux)…

Amenábar piétine avec ses gros sabots le cas Sampedro qui alla jusqu’à défendre sa cause devant les tribunaux pour tenter d’inciter les autorités à légiférer sur l’euthanasie…en vain. Alors M. Sampedro décida de marquer les esprits en filmant sa mort en direct après avoir avalé du cyanure. Une histoire délicate car récente dans les esprits et qui méritait une certaine pudeur, voire une distanciation à la fois sur Ramón et sur la question de l’euthanasie. Laisser planer un doute sur ce débat hyper sensible n’aurait pas été chose superflue…

Mais planer ne peut être que littéral chez Amenábar. Alors quand Sampedro disait s’envoler par la fenêtre pour rejoindre une femme tant aimée sur la plage, le cinéaste le prend au mot et s’envole bêtement par la fenêtre avec sa caméra pour survoler les paysages de Galice (Birdy d’Alan Parker, le retour !) quand il n’inonde pas son film de son abominable musique, croisement atroce du pire de James Horner, de Goldman, et de soupe celtique(Chansons pour les pieds rencontre Titanic).

Mais cette allégorie du conformisme et du mauvais goût non-assumé serait presque risible s’il n’y avait pas cette fin abjecte où Amenábar prend le parti de reproduire intégralement la mort face caméra de Sampedro. A ce moment-là, les interminables grimaces obscènes de Javier Bardem font autant d’effet qu’un crachat au visage et nous rappellent après deux heures de sentimentalisme niaiseux et démagogique que les pires navets reçoivent parfois les plus prestigieuses récompenses.
J.F. 

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