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Palindromes de Todd Solondz
Avec : Ellen Barkin, Shayna Levine, Richard Masur, John Gemberling

Affreux, sale et gerbant.

Aviva a douze ans et veut à tout prix être maman. Le jour où elle se retrouve enceinte, ses parents la forcent à avorter. Mais l’opération se passe mal et se termine en hystérectomie. Désespérée, Aviva fugue et se retrouve dans une famille de chrétiens fondamentalistes aussi tordus que dangereux…

Sur le plan linguistique, un palindrome est un mot ou une phrase que l’on peut lire dans les deux sens. Dans le contexte de ce film, il s’agit de prendre une héroïne, Aviva, lui faire traverser un nombre de péripéties et terminer le film là où il avait commencé. A cela s’ajoute une division en huit chapitres dans lesquels un interprète différent se glisse dans le rôle d’Aviva pour soit-disant illustrer de la meilleure façon possible l’identification à “un personnage entièrement et totalement sympathique…” dixit Todd Solondz. Mais les prétentions du réalisateur ne sont qu’une excuse minable pour étaler sa haine gratuite du genre humain : Todd Solondz ou la lente déception d’un espoir du cinéma indépendant.

A l’image du chapitre le plus court où Aviva, interprétée par un garçon, descend le Mississipi sur un radeau de fortune, Todd Solondz se rêve en nouveau portraitiste de l’adolescence difficile, en successeur de Mark Twain. Mais ce condensé en cent minutes de mépris Solondzien laisse à penser que celui qu’on avait découvert et apprécié avec Bienvenue dans l’âge ingrat est bel et bien mort. Ce premier film caustique était un portrait plutôt réussi de l’adolescence banlieusarde du New Jersey. Happiness, son second film, était dominé par son humour noir dévastateur. Pourtant, à la fin du film, Solondz franchissait la ligne jaune avec l’insupportable conversation entre un père pédophile, violeur en série et son fils. Le premier avouait avec force détails son désir pour le second. Cette séquence préfigure le regard que porte le cinéaste sur ses personnages dans Palindromes : des pantins déshumanisés et vicieux, les catalyseurs de sa haine. Ne pas chercher ne serait-ce qu’une infime trace de sympathie chez Aviva, Solondz la décrit au pire comme un monstre de foire, au mieux comme une nymphette filmée avec une telle condescendance qu’elle masque à peine la joie éprouvée par le cinéaste pour ses malheurs.

Palindromes se voudrait une peinture acide et intelligente d’une Amérique en crise permanente – donc immuable (voir le triste clin d’œil à Freaks) – elle n’est qu’un puits sans fond de provocations gratuites, rances et pathétiques, du “prêt à choquer le bourgeois” dissimulé derrière un pseudo exercice de style narcissique et sans intérêt (la scène dans la décharge de fœtus en putréfaction en dit long sur l’humour sinistre de ce film). Le dernier chapitre confirme cette théorie : Aviva apparaît sous les traits fatigués de Jennifer Jason Leigh et nous fait instantanément penser à sa meilleure prestation, celle de l’hôtesse de téléphone rose et mère au foyer de Short Cuts. A travers ce rôle et tous les autres, Robert Altman avait réussi là où Palindromes est un ratage total : le regard porté sur ses compatriotes était dur, sans compassion mais il était juste. Le regard de Todd Solondz est simplement celui d’un homme qui ne s’aime pas et qui veut le faire payer jusqu’à l’écœurement. Pitoyable.
J.F. 

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